Johnny Hallyday, entre lumière et blessures

Jul 9 / UniSing

Confidences d’une légende du rock français

Extraits d’un entretien exceptionnel réalisé en 2005

Introduction
Entré dans la mythologie collective, Johnny Hallyday a traversé les époques, marquant la scène musicale et la pop culture française. Mais derrière l’icône, peu connaissent l’homme, ses failles, ses douleurs, ses renaissances. À travers ses propres mots, extraits d’une interview accordée en 2005 à l’émission "Sept à Huit", nous retraçons le parcours d’un artiste hors du commun.
Plongez dans une interview fidèle à l’esprit et à la voix de Johnny, réalisée à un moment charnière de sa vie, alors qu’il venait de devenir père une nouvelle fois et sortait l’album "Ma vérité".

Enfance et blessures : « Je suis né abandonné »

Un début de vie difficile

Journaliste : Johnny, votre histoire commence par une épreuve. Comment avez-vous vécu votre enfance ?

Johnny Hallyday : « Il est entré dans notre vie et notre mythologie. Son histoire est la nôtre et pourtant on connaît peu la sienne, qu'il a si souvent cadenassée dans le secret. Mais il n'y aurait pas de chanteur abandonné s'il n'y avait pas eu un jour un bébé abandonné. Je suis né, pas dans la rue, je suis né en 1943 à Paris, d'un père belge, Jean Smet, et d'une mère parisienne française, Huguette Clerc. J'ai été abandonné par mon père à l'âge de sept mois. Qui est parti un jour, qui a vendu pendant ma première année... Ma mère était mannequin vedette chez Lanvin à l'époque et c'est elle qui faisait vivre donc la famille, puisque mon père ne travaillait pas. Et un jour il a vendu mon lit de bébé, etc., pour partir. Il m'a laissé sur une couverture par terre et il paraît qu'il est parti avec la crémière de la rue Lamarque. Voilà, c'est tout ce que je sais. C'est vrai que les autres gosses du quartier me disaient : "Ta mère t'a fait avec un Bosch, tu es un bâtard." Et c'est vrai que ça m'a énormément fait souffrir. Donc un soldat allemand, c'est dans la tête des gens, c'était tout de suite la Gestapo, tout de suite la croix gammée... »
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L’influence de l’enfance sur la carrière

Journaliste : Cette blessure a-t-elle influencé votre vie d’adulte ?

Johnny Hallyday : « Oui, l'infinie solitude est née ce jour-là. J'ai grandi sans savoir ce que c'était d'avoir un foyer. Je n'ai jamais dit papa ni maman. J'ai dû inventer des pères, me débrouiller seul. Cette blessure ne s'est jamais refermée, elle m'a poursuivi toute ma vie et a décidé de mon parcours. »
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La rencontre avec le père : « Le monde s’est un peu écroulé  »

Un rendez-vous manqué

Journaliste : Vous avez retrouvé votre père à l’âge adulte. Que retenez-vous de cette rencontre ?

Johnny Hallyday : « Un jour, vous êtes à l'armée, vous êtes en caserne et on vous annonce que votre père est là. Vous ne voulez pas le croire. Non, parce que mon père je l'avais jamais vu et je me disais : qu'est-ce que mon père viendrait faire à Offenburg en Allemagne, à l'entrée de la caserne où j'étais en base ? Je voulais pas y aller puis on m'a donné l'ordre d'y aller donc j'ai été et puis j'ai vu un monsieur avec un long manteau, il s'est précipité sur moi alors ça m'a fait un drôle d'effet parce qu'il m'a parlé avec l'accent belge en disant : "Je suis ton père", et ça m'a fait un choc déjà. Et puis il a sorti un ours en peluche de son manteau et là j'ai vu des paparazzis sortir un petit peu de partout pour faire la photo. Et par la suite, j'ai appris qu'il avait touché de l'argent pour venir faire cette fameuse photo à la sortie de la caserne où j'étais basé. Ce qui m'a fait le plus de mal, c'était... Au début, j'ai dit : tiens, mon père veut me voir, il s'intéresse à moi. Et puis, le monde s'est un peu écroulé, j'ai été très déçu quand j'ai appris que c'était pour le pognon finalement qu'il avait fait ça. Quand mon père est décédé, j'ai été à Bruxelles pour son enterrement. Et je crois que là, la chose la plus triste du monde que j'ai vue, c'était un cercueil que j'ai suivi pour le mettre en terre, il n'y avait personne. J'étais tout seul à suivre ce cercueil, pas un ami, pas une amie, personne. Et je crois que mourir dans une telle solitude, c'est terrible. »

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Blessures d’enfance et quête d’amour

Les cicatrices invisibles

Journaliste : Est-ce que vous êtes d’accord avec Bruel lorsqu’il dit que les blessures de l’enfance ne se referment jamais ?

Johnny Hallyday« Je suis d'accord avec ça. Ça m'a poursuivi toute ma vie. Je crois qu'un homme qui ne pleure pas, c'est un homme qui n'a pas de cœur. »

Amitié et inspiration : « J’aurais aimé avoir Brel comme père »

Des rencontres marquantes

Journaliste : Vous évoquez souvent votre amitié avec Jacques Brel.

Johnny Hallyday : « C'était mon grand ami Jacques, un insomniaque comme moi. On refaisait le monde la nuit, on partait déjeuner à 300 km dans son petit avion, puis il me ramenait au spectacle. J'avais beaucoup d'admiration pour l'homme. J'aurais bien voulu avoir Brel comme père. »


PROGRAMME

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La scène : énergie, communion et solitude

Un showman hors pair

Johnny Hallyday : « Avec la salle, quelle énergie... Quand je vois la façon dont les gens me regardent, je sais que je suis aimé. Je pense que je leur rends bien ça. Qu'est-ce qui reste de ces stades entiers remplis, de ces silhouettes lointaines, de ces applaudissements, de ces briquets allumés ? Ce sont des centaines de petites étoiles qui brillent comme dans le ciel dans ma tête et c'est formidable. Vous êtes tous vraiment courageux d'être là ce soir et de rester là ce soir. Et rien que pour ça, rien que pour vous et pour tout ça, je suis fier de faire ce métier par rapport à vous, merci. »

Le revers de la médaille : solitude et vertige

Johnny Hallyday : 

« On imagine jamais ce que c'est qu'un chanteur comme vous lorsqu'il sort de scène. On se dit qu'on reçoit beaucoup mais que l'autre en face est épuisé, on a tout donné et puis il y a une telle décompression,

une telle solitude quand on sort de scène. On était devant tous ces gens pendant deux heures, deux heures et demie, il y a un moment d'adaptation qui est douloureux. D'où viennent sans doute les insomnies après. En fin de compte, un artiste, ça n'a l'air de rien, mais c'est très seul, c'est très seul parce que moi, je sais, moi j'ai les crises de cafard immenses des fois parce que je me sens seul, terriblement seul. Je me sens seul même quand je suis au milieu de mille personnes. »

Fascination pour la mort, excès et résilience

La tentation du vide

Johnny Hallyday :  « J'ai toujours été obsédé par la mort. Ce qui me fait peur, c'est le temps, vieillir, se dire qu'un jour on va y passer. Et ça, j'y arrive pas à me faire à l'idée. Pour pas faire de jeux de mots... Au début, oui, je disais beaucoup de conneries quand j'étais plus jeune, j'étais "vivre vite et mourir seul". Aujourd'hui, je pense plus du tout pareil. C'est vrai que cette solitude, ce sentiment de solitude est si fort que ça va jusqu'à avoir peur aujourd'hui encore, à 62 ans, de vous endormir seul, que le soir est un moment d'angoisse, vous n'aimez pas la nuit qui tombe. J'ai même joué à la roulette russe... Heureusement, la balle n'était pas dans le bon trou. Oui, je l'ai fait. Moi, je fume, je me bourre la gueule, je baise, je fais tout et je suis en parfaite santé... maintenant. [Rires] Ce qu'il me faut vraiment, une fille, il me faut une fille. Amenez-moi ici. Il me fait rire cette année-là parce que c'est tellement loin de moi aujourd'hui que... comment j'ai pu dire des conneries pareilles.

Journaliste :
« Vous êtes d'accord pour dire que vous avez bien profité ? Oui, je suis toujours là. J'ai cru au diable pendant longtemps, pendant des années, mais j'y crois plus du tout. »
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Création, drogue et contrôle

L’envers du décor

Journaliste : Quelle a été la place de la drogue dans votre création ?

Johnny Hallyday : 
« Il a fallu attendre 98, dans une interview du Monde à votre ami Rondeau, pour que vous racontiez que ces chansons ne venaient pas de rien, venaient de la souffrance, venaient de la cocaïne aussi que vous avez pris le matin. Rien du tout. On croit qu'on fait les choses bien sous l'influence de la drogue et puis quand on réécoute le lendemain ce qu'on a fait, on dit c'est tellement mauvais, il faut tout recommencer. Je suis contre. Aujourd'hui, je suis contre ça. Ça fait perdre surtout l'essentiel. Ça fait perdre énormément de sentiments humains qu'on peut avoir par rapport à d'autres gens. Ça a l'air bizarre que ce soit moi qui le dise, mais je trouve que c'est de la merde. Tous mes amis à l'époque étaient des musiciens anglais ou américains, dont Jimi Hendrix, qui vivait chez moi quand il venait à Paris. Mais je n'ai jamais été très loin dans ces choses-là. J'ai fait des choses avec eux pour essayer mais je n'ai jamais persisté sur ces choses-là parce que c'est des choses qui me font peur. De perdre le contrôle de soi-même, c'est quelque chose qui m'a toujours fasciné mais aussi qui me faisait peur.

Journaliste :  «
Est-ce qu'on peut chanter sur scène drogué ?

Johnny Hallyday
: « Je ne l'ai jamais fait. Qu'est-ce qu'il reste de ces années-là ? Une grande gueule de bois. Rien d'autre. Aucun ami. Les amis de la nuit ne sont pas les amis qu'on a à vie. »
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Image publique, autodérision et renaissance

 L’art du recul et de l’observation

Johnny Hallyday : « Je suis assez menteur, oui, ça je sais, mais enfin je voulais pas en parler mais c'est un vice, je ne peux pas m'en empêcher. J'adore ça, c'est ce que je préfère. Et pourquoi pas ? Non mais j'aime bien, en plus j'ai un défaut, j'aime bien en général... [Rires] Il y a beaucoup de gens qui parlent beaucoup pour rien dire et moi ça m'a toujours amusé du nombre de choses que des gens qui parlent beaucoup peuvent dire qui sont sans intérêt. Je vous avais dit, ça me dérange pas du tout de passer pour un con, ça me permet d'observer. Oui, bien sûr, vous savez, plus les gens pensent que vous êtes con, moins ils se méfient de vous. Vous en avez souffert à une époque, ça, une période où les intellos ne vous aimaient pas ? Non, intello, non, quand j'ai fait le film avec Godard, j'avais soi-disant toute l'intelligentsia de gens soi-disant intellos qui venaient me voir en me disant : "Ah, vous êtes formidable dans le Godard !" Et tout d'un coup, mon image a changé parce que j'ai tourné avec Godard alors que je suis exactement pareil qu'avant d'avoir tourné le Godard. »

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La famille, le bonheur d’être père

Laeticia, Jade, David : la renaissance

Johnny Hallyday : « Je crois que je suis dans une phase de ma vie où je n'ai vrai semblablement jamais été aussi heureux. Là, c'est qui Laeticia ? Grâce à Laeticia, grâce à ma petite Jade, j'ai réussi à avoir une vie de famille que j'ai cherchée toute ma vie. Vous savez, j'ai Jade qui grandit chez moi, enfin j'envoie, j'ai un enfant qui grandit chez moi et je crois que la chose la plus merveilleuse, c'était il y a pas très longtemps, un soir j'étais dans la cuisine en train de dîner avec Laeticia et puis Jade gambadait à quatre pattes dans la cuisine et le lendemain, qu'est-ce qu'elle fait ? Elle se lève, elle marche. Savoir que ce petit bout de chou que j'ai vu à quatre pattes la veille, là, se mettre debout et faire ses premiers pas, ça, c'était quelque chose d'incroyable. C'est un papa au-delà de mes espérances. J'imaginais pas qu'il allait être comme ça avec elle et il est un papa formidable, il m'a beaucoup, beaucoup porté toutes ces années et il a toujours été là à mes côtés, en train de donner le biberon pour la première fois. Et David, ça m'a bouleversé.

J'imagine qu'il lui a offert une première chanson, c'est laquelle ? C'est "Love Me Tender". Même si je vis avec lui depuis 10 ans, ce regard de papa qu'il a sur elle, c'est merveilleux, c'est un côté très protecteur.
Sa vie a complètement changé. Et maintenant, vous êtes le soir à la maison, vous voulez chanter aussi des chansons à votre fille ? Je suis bien obligé, ma fille adore m'entendre. Ça doit être magnifique pour vous de vous sentir enfin père. Je me souviens que David avait dit un jour de mon père : "Des souvenirs de mon père, j'ai le bruit de ses bottes lorsqu'il rentre le matin." Ça vous a bouleversé cette phrase ? Oui, parce que je m'imaginais pas qu'il avait ressenti ça comme ça. Parce que moi, j'étais très souvent en tournée, que j'étais peut-être un peu jeune à l'époque comme père. C'est vrai que quand David est né, j'avais 23 ans et je savais pas ce que c'était qu'un père, étant donné que moi, j'avais déjà pas eu de père, alors j'ai eu beaucoup de mal à m'adapter. Mais le fait est là que c'est que mes enfants, c'est mes enfants et je les aime. »

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Johnny Hallyday et la pop culture : une icône transgénérationnelle

Un phénomène social et musical

Johnny Hallyday, c’est 79 albums, 40 disques d’or, 22 de platine, 10 Victoires de la Musique, 3 257 concerts, plus de 2 500 couvertures de magazines et 190 livres consacrés à sa vie.
Il a collaboré avec les plus grands (Aznavour, Berger, Goldman), partagé la scène avec Jimi Hendrix, et inspiré plusieurs générations d’artistes français.
Sa mort en 2017 a donné lieu à un hommage populaire inédit : un million de personnes dans les rues de Paris, 15 millions devant leur écran, et une inhumation à Saint-Barthélemy, son île de cœur.
« Johnny, c’est la France, c’est notre Elvis », dira un fan lors de la cérémonie

Regardez maintenant la vidéo complète des obsèques de Johnny Hallyday et revivez les moments forts de cette cérémonie poignante.

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À retenir – Les leçons de Johnny Hallyday

Résilience face à l’abandon et à la solitude

Résilience face à l'abandon et à la solitude
Johnny Hallyday a transformé les blessures de son enfance en une force créatrice qui a marqué toute sa carrière. 
« Je crois qu’un homme qui ne pleure pas, c’est un homme qui n’a pas de cœur. »

Énergie scénique et communion avec le public
Il a su créer une relation unique avec ses fans, offrant des concerts mémorables et une présence scénique hors du commun.
« Quand je vois la façon dont les gens me regardaient, je savais que j’étais aimé. Je leur rendais bien. »

Authenticité dans la création et la vie
Johnny n’a jamais caché ses doutes, ses excès, ni ses failles, faisant de son parcours une histoire sincère et universelle.
« J’ai voulu être la version française d’Elvis, mais avec mes blessures et ma rage à moi. »

Recherche de l’amour et du foyer familial
Après des années de quête, il a trouvé un équilibre grâce à sa famille, notamment avec Laeticia et ses enfants.
« Grâce à Laeticia, grâce à ma petite Jade, j’ai réussi à avoir une vie de famille que j’ai cherchée toute ma vie. »

Capacité à se remettre en question et à renaître
Malgré les épreuves, il a su se réinventer, traversant les décennies sans jamais perdre sa place de “l’idole des jeunes”.
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Johnny Hallyday en 5 questions

Quels sont les moteurs de la création chez Johnny Hallyday ?

La souffrance de l’enfance, la solitude, la quête d’amour, et la volonté de tout donner sur scène.
« Cette blessure ne s’est jamais refermée, elle m’a poursuivi toute ma vie et a décidé de mon parcours. »

Comment Johnny a-t-il vécu la célébrité ?

Entre euphorie des concerts et profonde solitude après le show.
« Après le concert, il y a une telle décompression, une telle solitude… Je me sentais terriblement seul, même au milieu de mille personnes. »

Quel héritage laisse Johnny Hallyday ?

Une icône du rock français, un exemple de résilience, et une source d’inspiration pour la pop culture et la musique.
« Johnny, c’est la France, c’est notre Elvis », dira un fan lors de l’hommage national. »

Quel rôle la famille a-t-elle joué dans sa vie ?

Une renaissance tardive, mais essentielle, grâce à Laeticia et ses enfants.
« Voir ma fille faire ses premiers pas, donner le biberon… c’était incroyable. »
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Conclusion

Johnny Hallyday laisse derrière lui une œuvre immense, des concerts mythiques, une influence majeure sur la musique et la pop culture françaises. Sa sincérité, sa fragilité, sa capacité à se réinventer et à renaître par l’amour familial font de lui une légende au-delà du rock.
À travers ses confidences, il livre une leçon de résilience, d’authenticité et d’humanité, inspirant des générations d’artistes et de fans.

Article réalisé à partir des confidences et souvenirs de Johnny Hallyday, pour célébrer l’héritage d’un monument de la chanson française.

Sources :
[Transcription intégrale Sept à Huit, TF1, 2005]
[Portrait TF1 Info]
[Dailymotion - Sept à Huit]
[Wikipedia]
À propos de l'auteure

Juliet
, passionnée par le chant et spécialisée en communication artistique, allie créativité et expertise pour mettre en valeur la voix et les artistes.
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