Interview exclusive : Billie Eilish & Finneas, secrets de création, complicité et conseils pour la nouvelle génération

UniSing : Billie, Finneas, merci de nous accorder cette interview. Pour commencer, pouvez-vous nous raconter comment est née votre collaboration musicale ?

Billie Eilish : Merci à vous ! En fait, on a toujours fait de la musique ensemble. On a grandi dans une maison où la créativité était encouragée. Nos parents sont musiciens, donc il y avait toujours des instruments qui traînaient. Je me souviens, j’avais onze ans quand j’ai écrit ma première chanson, et Finneas m’a tout de suite aidée à la mettre en musique. On a commencé dans notre chambre, sans pression, juste pour le plaisir.

Finneas : Oui, c’était très naturel. On partageait tout : les idées, les doutes, les moments d’excitation. Je pense que cette complicité fraternelle est le socle de notre travail. On se fait confiance, on se pousse à aller plus loin, et surtout, on ne se juge pas.

UniSing : Cette complicité se ressent dans votre musique. Comment décririez-vous votre processus créatif ?

Billie Eilish : Il n’y a pas vraiment de règle. Parfois, j’arrive avec une mélodie ou des paroles, parfois c’est Finneas qui propose une base musicale. On aime expérimenter, mélanger les sons, essayer des choses inattendues. Par exemple, pour "bury a friend", on a utilisé le bruit d’une fraise dentaire comme élément rythmique ! On s’amuse beaucoup à sortir des sentiers battus.

Finneas : On essaie toujours de rester authentiques. On ne cherche pas à faire un "tube" à tout prix, mais à exprimer ce qu’on ressent. Parfois, une chanson commence par une phrase entendue dans la rue ou une émotion forte. On laisse venir, puis on affine ensemble. L’important, c’est de ne pas se censurer.

UniSing : Parlons de vos titres phares. Pouvez-vous nous raconter la création de "Bad Guy" ?

Billie Eilish : "Bad Guy" est née dans nos chambres, littéralement. J’avais posé mon subwoofer sur une étagère, et ça faisait vibrer toute la pièce. Le son était un peu chaotique, très brut, mais on a adoré. On voulait faire quelque chose de différent, casser les codes de la pop. Je me souviens avoir dit à Finneas : "Personne n’a jamais dit ‘I’m the bad guy’ dans une chanson pop, surtout pas une fille." On a gardé cette idée, et on a peaufiné chaque détail, jusqu’à la prononciation du fameux "duh".

Finneas : C’est vrai, ce morceau a dormi presque un an avant qu’on le termine. On voulait que chaque élément surprenne l’auditeur. On a même hésité à garder la fin très minimaliste, mais finalement, c’est ce qui a fait son succès.

UniSing : Et pour "Happier Than Ever" ?

Finneas : Celui-là a une histoire particulière. On était au Danemark, super jetlagués, et j’avais une guitare-jouet à 80 dollars. On a commencé à écrire le refrain sur un coup de tête, inspirés par ce que Billie vivait à ce moment-là. La chanson a évolué sur plusieurs mois, chaque ligne ajoutée au fil du temps. On l’a terminée pendant le confinement, ce qui lui donne un côté un peu sinueux, comme une traversée émotionnelle.

Billie Eilish : J’adore cette chanson parce qu’elle montre qu’on peut prendre son temps. Parfois, il faut laisser mûrir les choses. C’est rare d’écrire un morceau sur une période aussi longue, mais ça reflète bien notre façon de travailler.

UniSing : Vos textes touchent souvent des sujets intimes, parfois sombres. Comment abordez-vous l’écriture ?

Billie Eilish : J’écris beaucoup sur ce que je ressens, même si c’est inconfortable. Je note tout : des phrases, des idées, des émotions. Ma mère m’a appris à écouter les dialogues de films ou de séries, à capter des expressions qui pourraient devenir des refrains. Par exemple, une fois, j’ai écrit une chanson entière inspirée de The Walking Dead !

Finneas : On essaie de rester sincères. Parfois, on commence par une simple phrase, comme "I’m not your friend", et on construit autour. On aime aussi jouer avec les contrastes : des mélodies douces sur des paroles dures, ou l’inverse. C’est ce mélange qui crée l’émotion.

Billie Eilish : Il y a aussi une part d’expérimentation sonore. On n’hésite épas à utiliser des bruits du quotidien, des samples inattendus. Pour "bury a friend", le bruit de la fraise dentaire, c’était une blague au départ, mais ça a donné une couleur unique au morceau.

UniSing : Vous avez toujours refusé de rentrer dans les cases. Pourquoi ce choix ?

Billie Eilish : Je n’ai jamais voulu être quelqu’un d’autre. On m’a souvent dit de faire des chansons plus "joyeuses" ou plus "commerciales", mais je préfère être honnête. Même si ça dérange, je pense que c’est ce qui touche les gens. Plus je suis moi-même, plus ma vie est belle.

Finneas : L’industrie veut souvent formater les artistes, mais je crois que le public ressent quand une musique est sincère. Il faut oser proposer quelque chose de nouveau, même si ça semble risqué. C’est en prenant des risques qu’on se découvre soi-même.

Billie Eilish : Et puis, il ne faut pas avoir peur du doute. Il y a des jours où je me demande si ce que je fais a de la valeur, mais c’est normal. Il faut apprendre à vivre avec cette voix intérieure sans la laisser prendre le dessus.

UniSing : Billie, tu es devenue une icône de la pop culture et de la mode. Comment vis-tu cette influence ?

Billie Eilish : C’est fou ! Je n’ai jamais cherché à être un modèle, mais je comprends que mon image compte. J’ai toujours aimé porter des vêtements amples, des couleurs de cheveux différentes, refuser la sexualisation forcée. Pour moi, la mode est un terrain de jeu, un moyen d’exprimer qui je suis sans avoir à me justifier.

Finneas : Billie a vraiment changé la donne. Elle a imposé le style oversize, prôné le confort et l’expression de soi. Son shooting pour British Vogue, où elle change radicalement de look, a battu des records sur Instagram. Ça montre à quel point les jeunes ont besoin de modèles qui osent être différents.

Billie Eilish : Je reçois beaucoup de messages de fans qui me disent que ça les aide à s’accepter, à ne plus avoir honte de leur corps ou de leur style. C’est la plus belle récompense.

UniSing : Votre parcours inspire beaucoup de jeunes musiciens. Quel conseil leur donneriez-vous ?

Billie Eilish : Faites de la musique pour vous, pas pour les autres. Ne cherchez pas à plaire à tout le monde. Soyez vous-même, même si ça ne correspond pas aux attentes. Plus vous êtes authentique, plus les gens vous suivront.

Finneas : Produisez votre musique, expérimentez, entourez-vous de personnes qui partagent votre vision. On a commencé dans notre chambre, avec très peu de moyens. Aujourd’hui, la technologie permet à chacun de créer un album chez soi. Ce qui compte, c’est l’émotion.

Billie Eilish : Et surtout, ne vous découragez pas. On a essuyé beaucoup de refus au début, mais on a continué parce qu’on croyait en notre musique. Le doute fait partie du chemin. Il faut l’accepter et avancer.

UniSing : Comment voyez-vous l’évolution de votre musique ? Quelles sont vos envies pour l’avenir ?

Billie Eilish : On aime surprendre notre public. Chaque album est une nouvelle aventure. Je ne veux jamais me répéter. La musique évolue, et nous avec elle. J’ai envie d’explorer de nouveaux territoires, de collaborer avec d’autres artistes, d’essayer des styles différents.

Finneas : On a la chance d’avoir une grande liberté. On veut continuer à expérimenter, à raconter des histoires qui nous touchent. Et surtout, rester fidèles à nous-mêmes.